MEMOIRE DU P. JACQUES
HALLAIRE-
PIONNIER DE L’EVANGELISATION
DU PAYS SARA
Abba Hallaire(p. Jacques Hallaire, sj) |
Les morts ne sont pas morts.
Ceux qui sont morts ne sont jamais partis
Ils sont dans l'ombre qui s'éclaire
Et dans l'ombre qui s'épaissit,
Les morts ne sont pas sous la terre
Ils sont dans l'arbre qui frémit,
Ils sont dans le bois qui gémit,
Ils sont dans l'eau qui coule,
Ils sont dans l'eau qui dort,
Ils sont dans la case, ils sont dans la foule
Les morts ne sont pas morts.
C’est avec cet extrait de notre cher Poète Birago Diop que nous voudrions introduire
nos propos en mémoire des 18 ans de la naissance au ciel de notre regretté Abba
Hallaire, le 28 mars 1996. Le Père Jacques Hallaire sj (1917-1996)
Qui était Jacques Hallaire
Le Père Jacques Hallaire est né à Paris en 1917, d'une famille de trois
enfants. Après ses études secondaires et universitaires il se préparait au
sacerdoce quand il était passé dans l’armée en septembre 1939. Sous-lieutenant,
il était prisonnier durant cinq ans, mais il continuait sa formation
théologique dans son camp d'officier. Libéré, il avait fait entré entrer au
noviciat de Laval en septembre 1945, ayant désiré l'apostolat de la Compagnie depuis
sa retraite de 1938. Ordonné en 1950, il était volontaire pour aller en mission
en Chine, apprend le chinois, mais malheureusement pour Hallaire, la routé de
Mao serait barrée en 1952. C’est ainsi qu’on lui propose la mission du Tchad
qui n’était pas prévue. Mais c’est là que le Seigneur l’appelle pour réaliser
sa mission.
P. Jacques Hallaire, dans un village sara avant 1960(?) |
Abba Jacques Hallaire y vivra 45 ans, toujours dans le Moyen Chari.
C’est là qu’il aurait souhaité y reposer en paix mais les choses s’étaient
passées autrement, contre sa volonté. « Abba Hallaire», comme on aime
l’appeler en pays sara, nous quittera le 28 mars 1996 suite une opération á
Paris d’un anévrisme à l’aorte.
Jacques Hallaire amoureux de la
culture sara
Mgr. Edmond consacrant durant la messe de clôture de l'année jubilaire |
Arrivé à Fort-Lamy en septembre 1952, il avait été affecté de suite au pays
Sara, cette plaine sillonnée des affluents du Chari, verdoyante et fertile.
Très vite Abba Hallaire découvrir la vie, les
traditions de l’ethnie madjingay qui
donnera des prêtres, des religieux et des religieux pour le Tchad et le monde
entier. Hallaire avait ses meilleurs moniteurs de la langue qui étaient les écoliers, les catéchistes, avec eux il
avait appris vite et bien la langue Sar. Il voulait comprendre ce peuple en
profondeur, sa culture, le sens de ses coutumes. En 1963 sa traduction de l'Evangile en Sar est publiée à Fort Lamy.
Cette étude de la langue devait ouvrir la voie à d'autres recherches, à une
mise au point progressive d'une orthographe spécifique pour indiquer les tons
de cette langue du groupe Sara. Il étudiait les traditions orales du pays sar
et rédigeait un opuscule savoureux sur "les noms de personnes" dans
cette ethnie, un autre encore sur les contes sar.
Père initiateur de messeigneurs Mathias Ngarteri et Edmond Jitaangar
A gauche, Mgr. Mathias Ngarteri, à droite, Mgr. Edmond Djitaangar |
Monseigneur Mathia Ngarteri Mayadi, actuel archevêque
de N’djaména était le collaborateur plus proche de Abba Hallaire. Avec lui, ils
se dédiaient à la traduction œcuménique de la Genèse dont le premier tirage
était sorti en 1985. Mgr Ngarteri l’accompagnait dans les retraites des
communautés chrétiennes tenues sous les arbres en brousse.
En effet, au temps du carême avec l'abbé
N'Garteri, curé de Koumra en ce temps-là, il animait les fameuses "retraites en brousse" du
diocèse de Sarh, un peu loin des villages, près d'un point d'eau; elles
groupaient successivement les chrétiens de Koumra et des villages environnants.
En mars 1985, la sécheresse de la
saison des pluies 1984 avait diminué les récoltes, les gens avaient peu de mil
à apporter; malgré cela ils étaient venus nombreux. Ils méditaient sur les
épreuves de Job, sur les tentations de Jésus au désert, sur la tempête
traversée par St Paul naviguant vers Rome. A la demande des chrétiens de Koumra
qui creusaient deux puits et construisaient la charpente du premier hangar, le
centre spirituel de Bendoyo était ouvert au Carême 1986.
Abba Hallaire le curé infatigable et dévoué à la pastorale itinérante
Successivement curé de Bedaya, puis de Koumogo où
se trouvait l'école de catéchistes du diocèse de Sahr, le Père Hallaire
découvrait la valeur du chant religieux comme expression et moyen
d'assimilation de la foi. Il stimulait beaucoup de catéchistes, de paysans, de
paysannes capables d'inventer des chants et de les exécuter avec allégresse.
Avec lui, en 1978 le Père Jacques
Fédry fondait le Centre d'Etudes
Linguistiques de Sahr que aujourd’hui porte son, « casse Hallaire ».
Ils voulaient former des chrétiens fiers de leur foi et de leur tradition
culturelle.
Abba Hallaire pionnier de
l’inculturation au Tchad
La couverture du livre de Abba Hallaire |
Le Père
Hallaire à Bedaya, rencontrant souvent le Mbang et les responsables de
l'initiation traditionnelle, le "yondo", pouvait éclairer les chrétiens sur les valeurs éthiques de cette
coutume, sur ses implications animistes, à différencier de l'initiation
chrétienne, à connecter aussi avec elle.
Son chef-d’œuvre « Naissance
d’une église africaine-Naissance d'une église africaine: lettres et chroniques
du pays sar, Tchad » illustre bien la dédication totale du Père
Jacques Hallaire pour l’évangélisation et la promotion de l’église du Tchad.
C’est un livre fait la chronique de la naissance
d’une Église africaine au Tchad entre 1952 et les années 1990, faite des
lettres écrites par l’auteur à ses compagnons jésuites, à des amis ou
bienfaiteurs ou à sa famille. Ces « Actes » de la naissance d’une Église en
terre tchadienne feront désormais partie de la mémoire des communautés
chrétiennes Sarh d’aujourd’hui et de demain mais aussi de l’Église universelle.
Hommage de Mgr. Edmond Djitangar à Abba
Hallaire
Mgr. Edmond Djitangar, le 08.01.12 à la cathédrale de Sarh |
« Les adieux du pays sara : Le Père Hallaire
a été un pionnier dans tous les sens du terme il a prospecté puis initié des
communautés catéchumènes, organisé et consolidé des communautés chrétiennes
avec un inlassable souci d'enraciner l'Evangile dans les cœurs par des
traductions, par une pastorale aussi respectueuse que possible de notre
culture. Peu de missionnaires ont réalisé cette promesse de savoir collaborer
humblement et loyalement avec des jeunes qu'ils ont catéchisés, baptisés et
envoyés au séminaire comme le Père Hallaire a su le faire avec nous. Il était
devenu le "vieux" autour de qui nous avions plaisir de nous retrouver
les soirs pour l'écouter nous parler des débuts de notre Eglise...il est resté
le plus jeune par sa vitalité, par son regard foncièrement optimiste sur le
futur de cette Eglise malgré les difficultés.
"Père Hallaire, les
vieux de nos villages pour qui tu avais beaucoup d'amitié, les catéchistes, les
collaborateurs, les communautés chrétiennes et religieuses, tous tes petits
frères dans le sacerdoce de Sarh te confient à Dieu et se recommandent à ta
bienveillante intercession, auprès de LUI" »
Intercède pour nous Abba Hallaire.
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